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Affaire Adidas-Crédit Lyonnais : validation de la saisine de la Cour de justice de la République

Affaires - Pénal des affaires
Pénal - Vie judiciaire, Procédure pénale, Droit pénal spécial
22/07/2016

Après la confirmation, en cassation, de l'annulation de l'arbitrage par la première chambre civile de la Cour de cassation (Cass. 1re civ., 30 juin 2016, nos 15-13.755, 15-13.904 et 15-14.145, P+B+I ; voir : http://www.actualitesdudroit.fr/browse/civil/procedure-civile-et-voies-d-execution/1604/nouvelle-etape-judiciaire-dans-l-affaire-adidas-credit-lyonnais), c'est au tour de l'Assemblée plénière de la Cour de se prononcer dans le cadre de l'affaire Adidas-Crédit Lyonnais.

Elle avait été saisie, en application de l’article 24 de la loi organique n° 93-1252 du 23 novembre 1993 (JO 24 nov.) sur la Cour de justice de la République, d'un pourvoi formé contre un arrêt rendu le 17 décembre 2015 par la commission d’instruction de la Cour de justice de la République, qui avait renvoyé la prévenue devant cette Cour en raison de négligence dont il était résulté un détournement de fonds publics par un tiers (C. pén., art. 432-16).

La prévenue contestait son renvoi, en invoquant le fait que le versement de fonds en exécution d’une décision judiciaire ou arbitrale exécutoire, fût-elle erronée ou infondée, ne constituait pas un détournement de fonds et que seul le constat d’une fraude ayant vicié la décision pouvait conférer à cette exécution le caractère d’un détournement. De plus, la poursuite du chef de négligence ayant permis un détournement suppose une condition préalable, relative au constat de l'existence du détournement lui-même.
Or des poursuites étaient en cours, à l'encontre de tiers, devant les juridictions de droit commun, précisément pour déterminer si la sentence arbitrale du 7 juillet 2008 et son exécution étaient ou non constitutives d’un détournement de fonds. La commission d'instruction ne pouvait dès lors se contenter de relever le caractère « indu » de la décision arbitrale : l’infraction de l’article 432-16 du Code pénal se trouvait dans la dépendance de la qualification pénale des versements effectués en exécution de la sentence, qualification faisant précisément l’objet de l’instruction en cours.

Pour justifier le rejet du pourvoi à cet égard, l'Assemblée plénière se fonde sur l'autonomie des poursuites : elle énonce « que la commission d'instruction, qui était saisie des seuls faits visés à l'article 432-16 du Code pénal, sur le fondement duquel la prévenue, membre du Gouvernement, avait été mise en examen, n'était pas tenue d'attendre l'issue de la procédure pendante devant le tribunal de grande instance de Paris, dans l’information suivie contre des tiers du chef de détournement de fonds publics, délit visé à l'article 433-4 du Code pénal ».
Ceci pour deux raisons :

  • d'une part,  en ce que le délit prévu à l’article 432-16 du Code pénal constitue une infraction distincte de celle visée à l’article 433-4 du même code et est autonome par rapport à cette dernière ;
  • d'autre part, parce que la procédure suivie devant la commission d'instruction de la Cour de justice de la République est indépendante de celles diligentées devant d’autres juridictions pénales.

 

La prévenue contestait également la caractérisation des négligences lui étant imputées. Sans véritable surprise, la Cour de cassation s'appuie sur l'appréciation souveraine des juges du fond. Elle constate d'abord que « l’arrêt, après avoir constaté que la prévenue, en sa qualité de dépositaire de l’autorité publique, avait la disposition de fonds publics, [a relevé] des manquements dans leur surveillance qui constituent autant de charges à son encontre d’avoir commis des négligences et [a retenu] que ces fautes ont rendu possible le détournement de fonds publics par des tiers ».
Elle déduit « qu’en l’état de ces énonciations, procédant de leur appréciation souveraine des faits, les juges ont justifié leur décision ; qu’en effet, la Cour de cassation, à qui il n’appartient pas d’apprécier la valeur des charges dont la commission a retenu l’existence à l’encontre de la personne mise en examen, n’a d’autre pouvoir que de vérifier si la qualification qui leur a été donnée par l’arrêt attaqué, justifie la saisine de la Cour de justice de la République ».

Source : Actualités du droit