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Conditions de la nomination d’un administrateur provisoire

Affaires - Commercial, Sociétés et groupements
28/06/2018
La nomination d’un administrateur provisoire ne nécessite pas que soit rapportée la preuve de circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société et la menaçant d'un péril imminent. Tel est le sens d’un arrêt rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation le 21 juin 2018.
En l’espèce, l’associée d’une société civile immobilière (SCI) a assigné cette dernière aux fins de voir prononcer son retrait et commettre un expert pour déterminer la valeur de ses droits. En cours d’instance, elle a renoncé à ses demandes initiales et a sollicité la désignation d'un mandataire.

La SCI a alors formé un pourvoi en cassation contre l’arrêt d’appel (CA Paris, Pôle 5, ch. 9, 10 nov. 2016, n° 15/22666), lui reprochant d’avoir accueilli cette demande sans rechercher si les circonstances de l’affaire rendaient impossible le fonctionnement normal de la société et la menaçaient d'un péril imminent, dont seule la preuve était de nature à justifier la désignation judiciaire d'un administrateur provisoire, ni moins encore s'en expliquer.

Solutions contraires

La Cour de cassation rejette le pourvoi. Elle affirme que c’est à bon droit que la cour d’appel a décidé de désigner un mandataire ad hoc pour une durée de six mois, avec pour missions :
– de se faire communiquer les livres et documents sociaux pour les exercices clos de 2004 à 2015 ;
– d'établir, pour chacun de ces exercices, un rapport écrit mentionnant l'indication des bénéfices réalisés et des pertes encourues ;
– de réunir une assemblée générale en charge de statuer sur les exercices clos couvrant la période de 2004 à 2015 ;
– d'approuver lesdits exercices et de se prononcer sur l'affectation des résultats.

La cour d’appel a légalement justifié cette décision, en relevant qu'il existait une mésentente entre les associés, qu'aucune assemblée générale n'avait été tenue malgré la demande de l’associée et que celle-ci n'avait pas eu accès aux documents comptables. Elle n’était donc pas tenue de procéder à une recherche inopérante relative aux circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société et la menaçant d'un péril imminent.

La troisième chambre civile adopte donc une position différente de celle de la chambre commerciale qui retient, au contraire, que la désignation d'un administrateur provisoire est une mesure exceptionnelle, qui suppose rapportée la preuve de circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société, et menaçant celle-ci d'un dommage ou d'un péril imminent (v. Cass. com., 6 févr. 2007, n° 05-19.008, F-P+B).

Par Vincent Téchené
Source : Actualités du droit