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Apport d'un bail rural par le preneur à une EARL sans autorisation de l'assemblée générale du GFA bailleur : prescription de l'action en nullité

Affaires - Sociétés et groupements
01/12/2017
Si aucune décision de l'assemblée générale d'un GFA, bailleur d'un domaine rural, n'avait expressément autorisé l'apport du droit au bail par le preneur à une EARL, les associés du GFA en avaient eu nécessairement connaissance lors de l'établissement de l'acte notarié postérieur qui a procédé entre ces deux sociétés, à une résiliation partielle de ce bail. Par conséquent, le point de départ du délai quinquennal de l'action en nullité de l'apport du bail à l'EARL doit être fixé à la date de l'acte notarié. 
Tel est le sens d'un arrêt rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation le 23 novembre 2017. En l'espèce par acte du 24 mai 1974, un locataire a pris à bail un domaine rural devenu propriété d'un GFA, dont il a été nommé gérant. Le 15 avril 2008, il a constitué, en tant qu'associé unique, une exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL), à laquelle il a apporté le bail et dont il a cédé les parts les 5 août et 15 septembre 2008. Par la suite, les 18 et 23 décembre 2008, il a été convenu entre le GFA et l'EARL une résiliation partielle du bail. Le locataire initial apporteur du bail est décédé le 15 septembre 2009. Par déclaration du 6 mai 2014, le GFA a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en annulation de l'apport de bail consenti à l'EARL, devenue société civile d'exploitation agricole (SCEA), et en résiliation de ce bail.

L'arrêt d'appel (CA Aix-en-Provence, 31 mars 2016, n° 15/13294) a déclaré irrecevable par l'effet de la prescription l'action du GFA. Celui-ci s'est donc pourvu en cassation, soutenant qu'il était dans l'impossibilité d'agir compte tenu du fait que le preneur à bail qui l'a ensuite apporté à l'EARL était par ailleurs gérant et associé majoritaire (à hauteur de 90 %) du GFA bailleur. Par ailleurs, la cour d'appel ne pouvait retenir, pour considérer que le GFA avait renoncé à agir en résiliation du bail, que les associés avaient eu connaissance de l'apport du droit au bail à l'EARL et l'avaient implicitement approuvé en convenant d'une résiliation partielle du bail litigieux.

La Cour de cassation rejette le pourvoi dans les termes suivants : « ayant retenu que, si aucune décision de l'assemblée générale du GFA n'avait expressément autorisé l'apport du droit au bail à l'EARL, les associés en avaient eu nécessairement connaissance lors de l'établissement de l'acte notarié des 18 et 23 décembre 2008 procédant, entre les deux sociétés, à une résiliation partielle de ce bail, la cour d'appel, qui a ainsi souverainement écarté une impossibilité d'agir et qui n'a pas retenu que le GFA avait implicitement renoncé à agir en résiliation, en a exactement déduit que, le point de départ du délai quinquennal devant être fixé à la date de l'acte notarié et non pas à la date du décès du gérant, l'action était prescrite ».

Par Vincent Téchené
 
Source : Actualités du droit