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Codébiteur solidaire : effet interruptif de prescription de la déclaration de créance

Affaires - Commercial
10/09/2021
La déclaration de créance du banquier prêteur au passif de la liquidation judiciaire du débiteur, bénéficiaire du prêt, interrompt le délai imparti au créancier pour agir à l’encontre de l’épouse codébiteur solidaire, et ce jusqu’au jugement prononçant la clôture de la procédure collective. Est censuré l’arrêt qui, en violation de cette règle, déclare prescrite l’action du créancier à l’égard du codébiteur.
Il résulte des articles 2244 et 2249 du code civil – dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 – et 1203 et 1206 du même code – dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 – que "la déclaration de créance au passif du débiteur en liquidation judiciaire interrompt la prescription à l'égard de son codébiteur solidaire et que cet effet interruptif se prolonge jusqu'au jugement prononçant la clôture de la procédure".
 
La Cour de cassation se prononce, dans la présente affaire, sur la base du principe ainsi rappelé.
 
Hypothèque sur l’immeuble des codébiteurs solidaires
 
Selon les faits de l’espèce, l’établissement bancaire X… avait consenti, par acte notarié du 3 février 2003, un prêt d’un montant de 245 000 euros aux époux Y… – séparés de biens – qui s’étaient engagés solidairement, ce prêt étant garanti par une inscription d'hypothèque prise par la banque sur un immeuble acquis par les époux Y… sous le régime de l'indivision. Alors que des échéances étaient restées impayées, la banque avait prononcé la déchéance du terme le 29 juillet 2005.
 
À la suite de la mise en liquidation judiciaire de M. Y… le 19 octobre 2005, la banque avait déclaré sa créance, à titre privilégié, le 25 octobre suivant ; la créance avait été admise par une ordonnance du 11 janvier 2008.
 
Par ordonnance du 17 juillet 2008, le juge-commissaire avait autorisé le liquidateur à poursuivre la licitation de l'immeuble visé. Cette licitation avait été ordonnée par un jugement du 28 février 2012, confirmé par un arrêt du 27 mars 2013, le pourvoi en cassation formé par les époux Y… ayant été rejeté le 25 juin 2014. À la suite de cette procédure, Mme Y… avait assigné la banque, le 1er juillet 2015, pour qu'il soit constaté que le bénéfice de la prescription lui était acquis.
 
Dans son arrêt infirmatif, la cour d’appel a déclaré prescrite l’action de la banque fondée sur le prêt notarié du 3 février 2003 à l'égard de Mme Y… : selon les juges du fond, l'interruption du délai de prescription résultant pour la banque de la déclaration de sa créance au passif de la liquidation judiciaire de M. Y… le 25 octobre 2005 avait cessé à compter de la décision du 11 janvier 2008 admettant cette créance.
 
La banque a porté le litige devant la Cour de cassation.
 
Effets de la liquidation judiciaire
 
En considérant, pour retenir la prescription, que si l’action n'était pas prescrite lors de l'entrée en vigueur de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, le 19 juin suivant, date à laquelle, en vertu des dispositions transitoires de cette loi, le délai de prescription biennal s'est substitué au délai de prescription décennal qui l'excédait, il appartenait désormais à la banque d'agir dans ce délai biennal sans qu'elle puisse se prévaloir, à l'égard de Mme Y…, des effets de la liquidation judiciaire ayant interrompu la prescription à l'égard de M. Y… jusqu'à sa clôture, la cour d’appel a violé les articles du code civil susmentionnés.
 
D’où cassation et renvoi des parties devant la cour d’appel.
 
Pour aller plus loin
Pour des développements complémentaires sur l’effet interruptif de prescription de la déclaration de créance, se reporter au no 3533 de l’édition 2021 du Lamy droit commercial.
Source : Actualités du droit